21 - Le grand couloir de Seine de Meulan/Les Mureaux à Mantes-la-Jolie
Je vois depuis l’autoroute, on a la centrale de Porcheville d’un côté, et puis des immenses falaises de l’autre… On se dit que se joue là une confrontation nature-culture. On est dans un paysage puissant. Et ça, à l’échelle de l’autoroute, on sent des choses. Mais quand on se balade à vélo là, on est un peu perdu. C’est un paysage de grand flux, de grand passage et de grande puissance. On se demande un peu comment habiter cette vallée de la Seine. On sent qu’après ça se calme, à partir de Mantes. Alain FREYTET Le secteur d’Aubergenville fait partie de ce grand espace au centre de Seine-Aval ; c’est une commune qui a un énorme potentiel de développement et qui concentre tous les aspects de cette vallée : industriel, villégiature, vallée de Seine, deux cités-jardins, mais aussi cette couche métropolitaine : une ville qui a géré cette articulation parfois difficile et rugueuse entre une logique métropolitaine et une qualité de territoire qui est très forte. Jean-Christophe RIGAL Plus on s’éloigne, et plus la logique de bassins de vie est affirmée. Elle est volontairement affirmée autour de Mantes. Entre les deux, c’est plus difficile, mais c’est surtout lié à l’armature urbaine, qui n’a pas autant de force. Meulan, sur la couronne rurale du Vexin, est un élément de polarisation, mais sur la rive gauche c’est plus compliqué. Mais c’est un secteur moins organisé, on a plus un agrégat de bassins de vie. Jean-Christophe RIGAL
Résumé
La Seine entre Meulan/Les Mureaux et Mantes-la-Jolie forme un couloir puissant et bien lisible grâce à sa régularité et à ses coteaux. Délaissé par les activités et les transports, le fleuve y apparaît à la fois majestueux et discret, progressivement reconquis comme une centralité naturelle. Les coteaux, essentiels pour le paysage, composent l’horizon permanent de la vallée et ouvrent des vues d’une remarquable ampleur. Malgré leur hauteur, ils s’avèrent fragiles. Lorsqu’ils sont de nature agricole, ils valorisent de façon remarquable le grand paysage comme le paysage de proximité. Le couloir de Seine est encore occupé par quelques grands espaces agricoles alluviaux, pérennisés grâce aux captages d’eau potable qu’ils protègent. De plus en plus urbains, leur rôle dans le grand paysage, en termes de fonctionnalités écologiques et de composition urbaine large est appelé à s’affirmer. Le grand paysage de la vallée est marqué par les installations industrielles, de grandes dimensions, souvent perceptibles de très loin, notamment les cheminées de la centrale de Porcheville, signal majeur du nord-Yvelines. Quelques formes urbaines puissantes émergent également, c’est ainsi le cas des Mureaux, de Mantes la Jolie ou d’Achères. L’ensemble de cette séquence de vallée est aujourd’hui gagné par des formes urbaines contrastées et hétérogènes, complexifié par le réseau d’infrastructures : grandes villes de plaines, villages de coteaux, grands ensembles, lotissements, zones industrielles, artisanales et commerciales, souvent juxtaposés. Ponctuellement, un patrimoine construit très varié émaille le paysage, souvent assez méconnu. Après des décennies de transformations majeures et parfois brutales, un processus de réhabilitation paysagère est à l’œuvre. Il se traduit par des opérations de renouvellement urbain qui transforment le cadre de vie des habitants, des Mureaux jusqu’à Mantes ; il se concrétise aussi par le développement des circulations douces en bord de Seine et la reconquête du fleuve.
Situation
Entre Meulan/Les Mureaux et Mantes/Limay, la Seine interrompt ses boucles sur plus de 20 km. Elle y trace une large vallée régulière, tenue par ses coteaux majoritairement boisés et tirés à l’horizontale, qui bordent le Vexin au nord et le plateau du Mantois au sud. Cette géographie généreuse a facilité le passage des infrastructures de transport comme le développement de l’urbanisation. Les deux villes historiques, Meulan et Mantes-la-Jolie, positionnées à chaque extrémité de la séquence, sont à l’origine des villes-ponts, établies sur des axes nord-sud importants au Moyen-Age, pour relier Beauvais à Evreux, Chartres et Orléans. Mantes-la-Jolie est aussi une ville-porte, fortifiée à proximité du royaume de France et de la Normandie anglaise, et cet héritage du Moyen-Age est toujours sensible aujourd’hui par la puissance du contraste entre l’urbanité de la ville, qu’affirment les tours émergentes du Val Fourré, et les grands espaces agricoles et de nature qui s’amorcent vers l’ouest et les boucles de Guernes et Moisson. Aujourd’hui, la logique est-ouest des déplacements prévaut largement, avec, outre la Seine :
- deux lignes ferroviaires, une sur chaque rive se rejoignant à Mantes-la-Jolie et permettant de rallier Saint-Lazare ;
- l’autoroute A13 qui, venant de l’est et Paris, profite du val d’Orgeval pour descendre du plateau des Alluets-Marly et rejoindre la vallée de la Seine aux Mureaux ; l’autoroute suit la vallée jusqu’au bout de cette séquence de vallée, passant aujourd’hui dans le tissu bâti de l’agglomération Mantoise.
Un pont relie les deux agglomérations de Meulan/Les Mureaux et de Mantes/Limay.
A partir des années 1950, cette logique a conduit à une explosion de l’urbanisation dans la vallée et sur ses coteaux, au point qu’il n’est pas simple d’identifier des pôles clairement différenciés, du fait de la réduction des coupures d’urbanisation : Meulan-Les Mureaux et Mantes-la-Jolie/Limay, forment les deux agglomérations principales, auxquelles s’ajoutent Epône-Mézières et Issou-Porcheville-Gargenville de part et d’autre du pont de la RD 130, maintenues à distance par l’inondabilité des terres et les zones de captage. Autour de ces pôles, les villages des coteaux ont grossi en bourgs faiblement distincts les uns des autres (Hardricourt-Mézy-Juziers en rive droite ; Bouafle-Flins-Aubergenville en rive gauche), et les développements urbains et industriels se sont opérés dans la vallée même, autour de Renault (Flins) et de la centrale thermique (Porcheville).
Unités de paysage locales :
Le grand couloir de Seine
Les coteaux de Limay
Les coteaux de Gargenville
Les coteaux de Mézières
Le coteau d’Orgeval (pour partie)
Caractéristiques paysagères, repérage d’enjeux
Un couloir de vallée puissant et bien lisible
De Paris au Havre, la géographie de la Seine est bien connue pour sa succession de boucles serrées. Pourtant, dans les Yvelines, le cours du fleuve offre une longue séquence plutôt linéaire, sans méandre tortueux. Les deux extrémités de cette séquence sont commandées par les villes-ponts historiques que sont Meulan/Les Mureaux à l’amont et Mantes-Limay à l’aval. De l’une à l’autre, la Seine dessine un couloir de vallée puissant et régulier, d’une vingtaine de kilomètres de long pour quatre kilomètres de large. Malgré cette ampleur de la plaine alluviale, la vallée reste bien lisible dans le paysage grâce à ses coteaux relativement élevés. Ils délimitent nettement ses horizons, grâce à leurs 60 à 100 m de hauteur, et à leur aspect boisé, notamment en crête. Ils garantissent l’intégrité et la lisibilité de cette grande unité de paysage, majeure pour les Yvelines.
Une Seine à la fois majestueuse et discrète
Au sein de cette généreuse plaine alluviale, la Seine large et calme sinue de façon ample, frottant successivement les coteaux de la rive droite de Meulan à Juziers, ceux de la rive gauche de Mézières à Mantes-la-Ville (que révèle le spectaculaire front de taille blanc de la carrière de Guerville, face aux cheminées de la centrale de Porcheville), puis à nouveau la rive droite à Limay-Follainville-Dennemont. Face à ces coteaux raides (concaves) et davantage boisés, trois grands secteurs à terrasse alluviale en pente douce (convexes) se succèdent ainsi : des Mureaux à Epône en rive gauche, de Juziers à Limay en rive droite, de Mantes à Rosny en rive gauche à nouveau.
Malgré son amplitude, la Seine apparaît aujourd’hui relativement discrète dans le grand paysage. Délaissée par les activités et le transport, elle reste à l’ombre de l’autoroute A13, le nouveau fleuve routier du XXe siècle, qui a profité de ce couloir direct et efficace pour s’y implanter dans les années 1950. La traversée de la Seine offre une perception majestueuse dans l’axe du fleuve ; mais, c’est un événement rare et un "levier" pour la mise en valeur au profit du paysage.
Aujourd’hui la Seine et ses berges offrent des ambiances plus intimes, calmes et davantage arborées, prenant une image et une valeur de nature de plus en plus appréciée et importante, au fur et à mesure de l’urbanisation de la vallée.
Cette ambiance est favorisée par les îles et bras de Seine, qui enrichissent les paysages et les milieux, bien que le fleuve ait été "simplifié" au cours du XIXe siècle pour les besoins de la navigation et de l’industrie. On comptait ainsi une vingtaine d’îles au XVIIIe siècle, d’après la carte de Cassini, contre six aujourd’hui seulement.
Au final la Seine, bien visible depuis les reliefs des coteaux, se révèle plus discrètement à hauteur d’homme, parfois prise "dans les rets des infrastructures et des installations industrielles" qui peuvent compromettre son accessibilité.
Localement, les collectivités aménagent les berges pour la promenade, les espaces de nature, les sports et loisirs. Les séquences aménagées apparaissent largement fréquentées, grâce à la proximité des espaces densément habités de la vallée, à la qualité des ambiances - en contraste fort avec le reste de la vallée, à l’offre en équipements de loisirs (pistes cyclables, aviron, voile, …) et à la facilité de promenades sans dénivelé.
- Faire de la Seine la charpente maîtresse de la qualité de vie dans la vallée.
- Aborder collectivement l’appropriation des berges et leur aménagement.
- Favoriser la traversée de la Seine voire l’accès aux îles par tout type de modes doux.
Des espaces agricoles de respiration dans la plaine alluviale
L’urbanisation massive de la vallée au cours des 70 dernières années a réduit l’emprise de la plaine alluviale cultivée. Quelques grands secteurs conservent leur vocation agricole et préservent de nombreux captages d’eau potable qui alimentent les villes :
- La zone de captage de Flins/Les Mureaux, en bord de Seine
- La pièce agricole de Bouafle/Flins/Les Mureaux, dans laquelle passe l’A13
- La zone de captage d’Aubergenville et son pied de coteau
- La zone de captage d’Epône et Mézières en bord de Seine
- La Vallée aux Cailloux, à la croisée des communes de Issou, Guitrancourt et Limay.
S’y ajoutent de multiples parcelles libres qui s’immiscent entre les zones urbanisées et permettent de mettre en scène le grand paysage pour les usagers : c’est le cas à Mézières-sur-Seine et à Epône par exemple.
Dans le contexte urbanisé, les zones de cultures composent des espaces de respiration qui interrompent l’urbanisation continue (coupures d’urbanisation), contribuent aux déplacements des espèces (corridors biologiques), et ouvrent les vues sur le grand paysage. L’organisation de ces trames paysagères passe par le maintien de l’activité économique agricole, le développement d’une gestion patrimoniale et l’organisation paysagère des franges urbaines pour assurer des transitions entre ville et espaces ouverts.
- Protéger les espaces agricoles de la plaine et des terrasses alluviales.
- Favoriser le développement des circuits courts.
- Composer des lisières pertinentes entre villes et espaces naturels.
Des paysages de coteaux précieux et fragiles
En rive droite comme en rive gauche, les coteaux jouent un rôle essentiel pour la qualité du paysage de la vallée.Ils ouvrent des vues de très grande ampleur, véritablement géo-graphiques, sur la séquence de vallée dans son ensemble. D’étonnantes percées lointaines et des paysages spectaculaires se découvrent même jusqu’à Paris et la Défense (coteaux de Mézy-Juziers) ou vers les boucles de Guernes et Moisson (coteau de Follainville-Dennemont).
Depuis la vallée, ces coteaux constituent les horizons permanents du couloir fluvial, très perceptibles et donc très sensibles. Plutôt réguliers et tirés à l’horizontale vus de loin, ils sont heureusement animés par des micro-affluents de la Seine et par quelques rivières qui infléchissent leur ligne : ru d’Orgeval, Mauldre, ru de Guerville et Vaucouleurs en rive gauche ; Montcient-Aubette et Vallée aux Cailloux en rive droite. Côté Vexin, s’ajoute l’effet de marche que constitue l’addition du coteau de la Seine avec celui des hautes buttes boisées du Vexin, qui laisse s’étendre des « champs suspendus » précieux pour les paysages, juste au-dessus de Juziers, Gargenville et Issou, et même de Mézy (Chenevière).
- Mailler les chemins piétonniers qui parcourent les coteaux à l’échelle intercommunale.
- Favoriser l’appropriation des grands paysages depuis le réseau des routes et des sentiers de coteaux.
- Préserver les « champs suspendus » au-dessus de Mézy, Juziers, Gargenville, Issou.
Attractifs pour l’urbanisation récente qui recherche la vue et l’ensoleillement, la sensibilité paysagère des coteaux de la Seine vient aussi de leur pente, en bien des endroits insuffisamment forte pour résister naturellement à cette pression. C’est ainsi que, ponctuellement, les coteaux ont été urbanisés jusqu’à leurs crêtes, ce qui crée une rupture dans la continuité paysagère formée par le coteau au sein du grand paysage fluvial. En d’autres secteurs, ils apparaissent fragilisés par le mitage. Ailleurs, les boisements des crêtes renforcent précieusement la présence et la lisibilité des coteaux dans le grand paysage.
Depuis un siècle et la fin de la viticulture, l’abandon progressif des terres, aujourd’hui trop pauvres et trop raides pour être cultivées de façon rentable, ont contribué à une relative "fermeture" du paysage des coteaux par les friches puis les bois. Cela rend d’autant plus précieux les magnifiques micropaysages des pentes cultivées qui existent encore ponctuellement. Les cultures qui y sont maintenues jouent en effet un rôle essentiel pour la qualité des paysages. Depuis la plaine alluviale, elles festonnent les lisières boisées, diversifiant les ambiances et enrichissant les milieux ; elles contribuent à l’ouverture de la vallée et offrent des espaces de respiration bien venus dans une vallée largement urbanisée. Depuis les hauteurs, les cultures des coteaux garantissent les ouvertures visuelles qui mettent en scène le grand paysage de la vallée, dans des panoramas puissants et généreux, toujours spectaculaires.
- Protéger les coteaux et leurs espaces agricoles.
- Garantir la continuité des horizons boisés.
- Maintenir des espaces de respiration entre les surfaces bâties.
Des grandes implantations industrielles et urbaines qui ponctuent puissamment le paysage
Le train est arrivé tôt dans la vallée de la Seine, dès les années 1850 en rive gauche et à la fin du XIXe siècle en rive droite. Il s’est ajouté aux deux routes historiques est-ouest : les actuelles RD 190 en rive droite et RD 113 en rive gauche. Pourtant, les profondes transformations du paysage, dont le résultat est observable aujourd’hui, datent du XXe siècle, et tout particulièrement de la seconde moitié, lorsque se avec de grands projets d’infrastructures, d’équipements et d’urbanisation : autoroute A13, zones industrielles, centrale de Porcheville, les grands ensembles. La création de l’autoroute A13 au mitan du siècle a considérablement accéléré les mutations. Elle a favorisé le développement des industries, notamment l’industrie automobile. Puis plus récemment elle a cristallisé à ses abords les zones d’activités commerciales, qui contribuent aujourd’hui à "banaliser" le paysage de son parcours et de ses abords. En raccourcissant les temps de parcours, elle a rendu attractifs des villages restés jusqu’alors hors du mouvement des migrations pendulaires domicile-travail, bien au-delà du seul périmètre des gares ferroviaires. Ils ont ainsi considérablement grossi. Elle a tourné le dos au fleuve comme artère de vie et de communication. Enfin elle continue grâce à l’activité agricole à révéler aux automobilistes le grand paysage fluvial et industriel de cette séquence de la Seine, notamment de façon étonnante au droit de la centrale de Porcheville et de la carrière de Guerville.
Aujourd’hui, le couloir de la vallée apparaît ponctué par les grandes installations industrielles du XXe siècle, qui composent des signaux puissants et pour certains spectaculaires : EADS aux Mureaux, Renault à Flins, la cimenterie de Gargenville, la raffinerie d’ Issou, la centrale thermique de Porcheville, le port industriel de Limay, la carrière de Mézières-sur-Seine. Les deux cheminées de la centrale thermique, culminant à 220m, marquent le grand paysage de la vallée et restent visibles d’une bonne partie du nord du département. Un lien fort s’est construit entre les industries et la nature. Ce lien contribue à la singularité de ce territoire.
Localement, le paysage subit la forte présence des lignes électriques, en particulier autour de la centrale de Porcheville et de certains bords de Seine.
Autres signaux marquants, les grands ensembles de tours et de barres témoignent des années 1950-1970 dans le grand paysage aux Mureaux, à Mantes-la-Jolie, et sur les coteaux comme à Meulan ou plus discrètement à Aubergenville.
- Harmoniser le lien industrie-nature .
- Susciter une vision qualitative des installations industrielles.
- Enfouir les réseaux aériens dans les secteurs les plus sensibles, urbains, agricoles ou naturels.
Des formes urbaines contrastées et hétérogènes, complexifiées par le réseau d’infrastructures
Malgré la géographie simple et lisible du couloir de Seine yvelinois, le paysage apparaît aujourd’hui complexe en termes de perceptions et d’usages, du fait des très puissantes évolutions vécues depuis les années 1950 : aux grands terrains agricoles alluviaux encore restants s’ajoutent des boisements (bois de Saint-Vincent), des friches (Porcheville), des implantations urbaines d’habitations individuelles et de grands ensembles collectifs, de vastes installations industrielles et de zones commerciales, les grandes infrastructures autoroutières, routières ou ferroviaires, et le tout dans le cadre contraint de franchissements rares du fleuve. L’ensemble apparaît aujourd’hui juxtaposé, dans des confrontations parfois brutales, avec des espaces de respiration devenus ténus entre les secteurs urbanisés.
Pourtant, un décalage intéressant existe entre ce que dit la carte et ce que voit l’œil à hauteur d’homme. Alors que la vue aérienne montre une vallée largement urbanisée, la présence végétale importante atténue en bien des endroits la perception de l’urbanisation. Cette présence végétale esquisse ainsi une charpente paysagère qui structure la vallée. Cette charpente naturelle pourrait préfigurer une grande continuité structurante pour la biodiversité.
- Consolider la charpente paysagère de la vallée.
Deux grandes villes de plaine
A chaque extrémité de cette unité de paysage fluviale, deux villes-ponts se sont développées historiquement : Meulan et Mantes-la-Jolie. A l’époque médiévale, les deux cités commandent non seulement des péages sur le fleuve, mais aussi des axes routiers nord-sud (Beauvais, Evreux, Orléans, …), importants avant que l’attraction métropolitaine parisienne ne privilégie les axes est-ouest rayonnant depuis la capitale. Ce sont les îles qui expliquent ce développement urbain historique des deux pôles urbains historiques du secteur, facilitant l’édification des ponts sur la large Seine.
Avec les développements récents des deux villes, y compris sur leurs rives opposées (les Mureaux et Limay), la Seine redevient attractive par de multiples aménagements communaux sur les berges et les îles.
Fait remarquable, Mantes apparaît aujourd’hui encore comme une ville-porte dans le paysage, comme au Moyen-Age lorsqu’elle jouait son rôle défensif entre la Normandie et le royaume de France : bien marquée par sa nappe urbaine d’où émergent sa collégiale et les tours du quartier du Val Fourré, elle apparaît toujours en contraste puissant avec la séquence « nature » de la vallée qui la suit immédiatement : les boucles de Guernes et de Moisson. Mais cette netteté est fragile, à la merci de l’urbanisation qui grignote l’espace de respiration entre Rosny-sur-Seine et Mantes-la-Jolie. Cet espace de respiration qui interrompt le continuum urbain devient le garant de la qualité du cadre de vie local. Les franges urbaines qui circonscrivent ce périmètre, nécessitent un traitement paysager de qualité .
- Aménager une lisière urbaine spécifique entre Mantes-la-Jolie et Rosny-sur-Seine.
Des villages de coteaux
La plupart des villages d’origine sont localisés au pied ou sur les coteaux, à la faveur de microplis façonnés par de petits affluents de la Seine : c’est le cas de Mézy, Juziers, Gargenville, Bouafle, Flins, Aubergenville, Epône, Mézières, Mantes-la-Ville et Buchelay. Les centres anciens offrent ainsi leur présence mesurée et précise dans le paysage, à l’écart des zones inondables. Les pentes des coteaux et des micro-vallons, que dévalent les rues, contribuent au charme de ces sites bâtis, avec les vues larges qui s’ouvrent brièvement sur la vallée. Le bâti traditionnel, marqué par la meulière, la pierre calcaire et les enduits presque blancs en rive droite, signe l’immédiate proximité du Vexin Français. Autour de ces villages se sont construits des lotissements desservis par des emprises minérales accompagnées de clôtures hétérogènes.
- Poursuivre la mise en valeur des centres-villes.
- Créer des promenades hautes et des points de vues.
- Veiller à l’intégration paysagère des lotissements.
Des formes urbaines récentes, héritées du XXe siècle
Le XXe siècle a légué des formes urbaines nouvelles, contrastées :
- Les grands ensembles marquent encore le grand paysage de leurs tours et barres aux deux extrémités de l’unité de paysage, aux Mureaux et plus encore, de façon spectaculaire, à Mantes-la-Jolie. Depuis les années 2000, ils font l’objet de profondes transformations, touchant aussi bien l’urbanisme (destructions d’immeubles, percements de voies, reconstructions), que l’architecture et les espaces publics (réorganisation des circulations et des stationnements, plantations, résidentialisation, …) ;
- Les lotissements ont fait s’étendre les villages d’origine dans une architecture souvent standardisée ; ils fragilisent les centres anciens et consomment un espace agricole réduit à des zones de périmètre de captage des eaux ; mais certaines extensions fragilisent aussi le paysage de la vallée en consommant les coteaux et les espaces de respiration/coupures d’urbanisation.
Dans le même temps, l’urbanisation traditionnelle paraît par endroits vieillissante avec un bâti dégradé et des espaces publics "dominés" par le passage des routes . C’est encore vrai pour certains centres-bourgs et centres-villages, tandis que d’autres connaissent ou ont connu récemment des reconquêtes de qualité, comme à Mantes-la-Jolie ou aux Mureaux.
Mais c’est aussi vrai pour certaines des entrées de ville où les larges emprises routières sont bordées d’activités commerciales ou industrielles très perceptibles dans le grand paysage de la vallée qu’elles fragilisent.
- Revaloriser les tissus urbains autour des routes.
- Donner une qualité paysagère aux entrées de villes et aux zones d’activités .
Un patrimoine construit varié
Dans les Yvelines le grand couloir de la Seine bénéficie d’un patrimoine architectural, urbain et industriel varié, reflet des époques successives ; De la collégiale de Mantes aux cheminées de Porcheville, du pavillon meulière 1900 à la villa Poiret de Mallet-Stevens, des centres anciens médiévaux aux lotissements expérimentaux (cité-jardin d’Elisabethville, lotissement Zehrfuss), des châteaux et parcs à certains grands ensembles et espaces verts (comme le parc d’Acosta à Aubergenville), l’ensemble est conséquent mais reste encore assez mal reconnu en dehors des quelques « phares » historiques.
A ce patrimoine bâti s’ajoute celui des parcs et domaines : le château et parc d’Issou, le château des Célestins à Limay, la zone de loisirs de Porcheville et celle de Verneuil. S’ajoute également un patrimoine naturel : le secteur des Graviers à Flins (carrière alluviale, en lien avec le bois de Saint-Vincent), la Vallée aux Cailloux à Issou/Porcheville, le Domaine régional du Bout du Monde à Aubergenville, les îles, …
- Préserver le patrimoine bâti et l’ inscrire dans un réseau de découverte d’ensemble.
- Mettre en valeur le patrimoine naturel et ses caractéristiques.
Un processus de reconquête paysagère engagé
La vallée de la Seine fait l’objet depuis quelques années d’une reconquête paysagère, qui se concrétise dans plusieurs domaines :
- le renouvellement des quartiers de grands ensembles, opérations ambitieuses menées dans le cadre des opérations ANRU. Elles requalifient le cadre de vie des habitants, depuis les Mureaux à l’amont jusqu’à Mantes-la-Jolie en aval, avec des transformations spectaculaires à des échelles très importantes ;
- la requalification des centres-villes et villages, comme à Mantes-la-Jolie par exemple ;
- la redécouverte des bords de Seine. Le fleuve est reconsidéré, avec des reconversions de friches, de nouveaux accès et surtout des circulations douces permettant à la population de se réapproprier ses berges ;
- des projets de réalisation de passerelles sur la Seine ;
- la reconquête écologique des berges par les travaux du Syndicat Mixte d’aménagement, de gestion et d’entretien des berges de la Seine et de l’Oise.
L’ensemble de la reconquête du couloir de Seine Yvelinois s’inscrit dans le cadre d’une Opération d’intérêt national.
- Privilégier une approche paysagère globale de l’aménagement et de développement du couloir de la Seine.