03 - Le plateau d’Ablis
<quote|legende=Ces grands territoires de Beauce mériteraient de s'humaniser un peu et de retrouver une échelle... Peut-être pas partout, parce qu'on aime bien aussi garder la puissance de ces grands territoires, mais avoir peut-être des endroits où on pourrait atterrir et aller jusqu'à un village, jusqu'à... Aujourd'hui, on a l'impression que ce sont des îlots, on dirait qu'ils sont inaccessibles. Que la mer qui les sépare est infranchissable. Demain, si on pouvait nous laisser une petite barque qui nous permette d'accéder, un chenal… Car même là, on a une microtopographie, à peine lisible, à peine visible, qui constitue une trame toute trouvée pour retrouver ces continuités. Ce sont des petits vallons à peine sensibles ; déjà dans un fossé on voit qu'il y a des choses qu'on trouve en bas qu'on ne trouve pas en haut, et ça raconte à demi-mot la trame générale, celle de la grande tapisserie qui se joue là.|auteur=Alain FREYTET>
Résumé
Le plateau d’Ablis, à l’extrême sud des Yvelines, marque l’ouverture vers la Beauce qui s’étend bien au-delà de la limite départementale, jusqu’à Orléans et Chartres. Il se présente comme une vaste mer de céréales, parfaitement tirée à l’horizontale, composant un paysage épuré, à la fois, puissant et fragile. L’immédiate proximité de la forêt de Rambouillet et la nature des sols confèrent au paysage du plateau certaines caractéristiques qui le distinguent de la « pure » Beauce plus au sud : la présence des horizons boisés, qui bornent les étendues ; la ponctuation de remises forestières de petites dimensions ; la présence aux franges de quelques pâtures ou vergers relictuels. Même les villages, par l’emploi de la pierre meulière, trahissent la proximité du plateau d’Yveline. Compacts vus de l’extérieur, ils composent comme des oasis de fraîcheur à l’intérieur, par les dispositions d’aménagement prises : mares aménagées, herbes et arbres. Ablis, au cœur du plateau, forme une petite capitale de la Haute Beauce, d’où rayonnent les voies routières. Plus globalement le plateau reste aujourd’hui un lieu de passage et de carrefour, avec les autoroutes A10 et A 11 et la ligne TGV atlantique.
Situation
Le grand triangle que forment les Yvelines s’achève en pointe au sud par le plateau d’Ablis. Au sud de Rambouillet et de sa forêt, il marque l’ouverture radicale vers la Beauce et ses grandes cultures tirées à l’horizontale. Dans le département, il s’allonge sur une vingtaine de kilomètres du nord au sud pour une douzaine d’est en ouest, entre Drouette et Rémarde. Il déborde dans les départements voisins jusqu’à la vallée de l’Aunay en Eure-et-Loir, et jusqu’aux premiers boisements des vallées de la Renarde, de la Louette et de la Chalouette en Essonne. Au cœur de cette Haute Beauce, Ablis concentre les voies historiques qui y convergent en formant une étoile, notamment la RN 10 et la RN 191. Le plateau tout entier est confirmé comme carrefour de passage entre l’Ile-de-France et le sud et ouest de la France par le passage des grandes infrastructures contemporaines que sont l’A10, l’A11 et la ligne TGV Atlantique.
Unités de paysage locales :
Le plateau de Sonchamp, antichambre de la Beauce (nord d’Ablis)
La Beauce Yvelinoise ou Haute Beauce (sud d’Ablis)
Le vallon du ru du Perray
Caractéristiques paysagères, repérage d’enjeux
Une mer de céréales tirée au cordeau
Si les plateaux du Hurepoix, au nord de la forêt de Rambouillet, annoncent déjà les grandes étendues cultivées, l’ouverture au sud de Rambouillet prend une autre ampleur : la Beauce cultivée qui s’y déploie va franchir les limites départementales, jusqu’à Orléans au sud et jusqu’au Perche à l’ouest, bien au-delà de Chartres.
Cette impression d’espace est renforcée par la parfaite planéité du plateau, tiré sur une impressionnante horizontale. Elle est surtout liée aux grandes cultures céréalières qui s’y déploient . Les plus beaux panoramas beaucerons sont d’ailleurs ceux qui s’offrent dans toute leur simplicité épurée et radicale. Ce sont des paysages fragiles car la moindre verticale y est visible.
- Enterrer les réseaux aériens très visibles dans les paysages.
- Préserver le paysage dans les aménagements.
Le plateau de Sonchamp et ses remises forestières, antichambre de la Beauce
L’emprise agricole sur le plateau beauceron est liée à la qualité du sol, composé de limon sain et épais. Mais, dans les Yvelines, ce sol typiquement beauceron se situe essentiellement au sud d’Ablis. Au nord, jusqu’aux portes de Rambouillet, le sol est constitué de limon humide sur argile, comme les plateaux du Hurepoix, d’un peu moins bonne qualité. Il constitue le plateau de Sonchamp, déjà beauceron mais présentant quelques particularités paysagères.
La nature de son sol et sa position en bordure du massif de Rambouillet font qu’il laisse ponctuellement encore place à quelques rares pâtures, prairies voire vergers, notamment à proximité des villages ou de la forêt.
Par ailleurs le paysage des grandes cultures est tenu par les horizons boisés : ceux de la forêt de Rambouillet, mais aussi ceux de la Drouette à l’ouest et de la Rémarde à l’est. Ils confèrent au plateau une échelle plus resserrée qui contribue à sa personnalité. A proximité des lisières, l’irrégularité des découpes entre forêts et cultures favorise par ailleurs les effets de profondeur du paysage et contribue à le valoriser.
Enfin la proximité du massif de Rambouillet a favorisé le maintien de remises forestières pour la chasse , petits bois de 100 à 200 m de côté, qui ponctuent en taches sombres les étendues lumineuses des céréales et contribuent à les animer.
On les retrouve au sud d’Ablis, où ils perdent l’appellation de « remises » au profit de celles de « bois ».
- Maintenir la diversité paysagère en lisière du massif forestier de Rambouillet.
- Préserver les remises forestières, bosquets et boisements favorables à la qualité paysagère spécifique du plateau d’Ablis et à la richesse cynégétique et biologique.
Le vallon du Perray, "oasis" linéaire
Un seul cours d’eau traverse les étendues du plateau. Il prend sa source au nord d’Ablis puis, arrivé à proximité de la ville, il infléchit son cours vers l’ouest pour arroser au passage Prunay-en-Yvelines. Ce pli modeste, d’une vingtaine de mètres de profondeur, suffit localement à animer le paysage par le vallonnement qu’il offre, mais aussi par les boisements qu’il cristallise à ses abords. Il prend ainsi l’image d’une "oasis" linéaire, serpent vert dans le désert fertile des blés. Le vallon du ru du Perray peut être identifié comme un des principaux corridors écologiques du secteur. Celui-ci est d’autant plus important qu’il est connecté à de nombreuses masses boisées relativement isolées par ailleurs.
- Privilégier l’approche interdépartementale des sentiers de randonnée dans le réseau plus large de Rambouillet et la vallée de l’Eure.
- Conforter le vallon du ru du Perray dans sa fonctionnalité de corridor écologique.
- Maintenir les continuités écologiques qui ponctuent et diversifient le paysage.
Des villages regroupés offrant des espaces accueillants
Les villages du plateau d’Ablis, comme tous ceux de la Beauce, apparaissent plutôt ramassés et compacts. Ils se sont souvent développés à partir d’un noyau linéaire autour de la route, qui cristallise le bâti le plus ancien. Ils intègrent des fermes traditionnelles souvent de belle qualité architecturale, notamment lorsqu’elles prennent un caractère presque abstrait de loin, avec peu d’ouvertures sur l’extérieur, toutes entières tournées sur leur cour. Tous les villages sont aujourd’hui accompagnés à leur périphérie de bâtiments agricoles récents adaptés aux besoins contemporains des exploitations.
La proximité du plateau de Rambouillet se lit dans l’architecture soignée des villages, marquée par la présence de la meulière, qu’elle soit en pierre apparente, en écailles ou enduite à pierres vues.
Vers le sud, le calcaire blanc du sous-sol beauceron apparaît dans les murs, parfois encore accompagné de meulière en mélange ou en cloutage de joints colorés.
Globalement, les villages ont su offrir à leurs habitants un cadre de vie agréable, en réaménageant leurs espaces publics et en adoucissant les ambiances par la présence d’herbe et d’arbres, dont la verdure suffit à faire de chacun une sorte d’oasis protectrice, en contraste fort avec les grandes étendues cultivées et ouvertes à l’extérieur. Toutefois, les extensions sous formes de lotissements tendent aujourd’hui à se confronter brutalement aux grandes étendues cultivées, sans transition. Il en résulte des fronts bâtis parfois peu harmonieux.
- Poursuivre la valorisation des villages par des aménagements simples.
Ablis, capitale de la Beauce yvelinoise
Au cœur du plateau de Haute Beauce, Ablis concentre tous les parcours des routes, constituant un remarquable réseau étoilé qui témoigne du statut de la ville. Établie dès l’époque de la Gaule celtique, elle prend son statut de noeud routier à l’époque romaine, en étant au carrefour de deux voies romaines importantes : Beauvais-Orléans et Paris-Chartres. Son noyau ancien est aujourd’hui surtout perceptible autour de la rue Pierre Trouvé, ancienne route de Paris à Chartres orientée est-ouest. Dominée par l’imposante église Saint-Pierre-Saint-Paul, la petite ville offre un patrimoine bâti d’intérêt au fil de ses rues. Elle grossit de façon concentrique, mettant en jeu par ses extensions ses relations avec les grandes étendues cultivées de la Beauce.
Une pression liée au développement éolien
A la pointe nord de la Beauce, le plateau d’Ablis est considéré comme favorable au développement de l’éolien et reçoit une forte pression en ce sens. Les éoliennes du département voisin d’Eure-et-Loir se perçoivent déjà à l’horizon. Elles méritent d’être prises en compte dans les projets concernant les Yvelines, pour éviter la saturation paysagère et tenir compte des dimensions plus faibles du plateau d’Ablis, comparé au plateau de cœur de Beauce plus au sud.