La géologie et les sols

Les paysages d’aujourd’hui sont ancrés dans la longue histoire des événements tectoniques qui se sont produits dans le Bassin Parisien il y des dizaines de millions d’années. Ceux-ci ont décidé de la fertilité des sols et par là de leur utilisation. Les nombreux plis qui jalonnent le département sont tous d’origine tertiaire et s’orientent suivant une ligne directrice nord-ouest sud-est appelée « direction armoricaine.

Villages en pierre, habitat troglodyte de la vallée de Seine, sous-sol perforé d’anciennes carrières, économie et bâti liés à l’extraction des sables, granulats et pierre : les Yvelines portent partout les traces de leur géologie.
Le paysage le plus emblématique n’est-il pas celui que Monet choisit comme toile de fond lorsqu’il peignit à Vétheuil dans la boucle de Moisson, les pinacles de craie des falaises du Lutécien ?

L’histoire géologique dans la formation des paysages

publié le 13 novembre 2014 (modifié le 8 janvier 2015)

Plateaux, grandes vallées, vallons, buttes ou falaises, la diversité géomorphologique des paysages Yvelinois est héritée d’une lointaine histoire. Le Bassin Parisien forme une immense cuvette sédimentaire témoignant d’une série de transgressions marines et d’épisodes laguno-lacustres.

Il se présente grossièrement comme une pile d’assiette, avec les couches les plus récentes au centre et les plus anciennes en périphérie. S’incurvant sous son poids, cette cuvette a évolué pendant une soixantaine de millions d’années sous un climat tropical. Le Crétacé, majoritairement formé de craie, forme une assise-sous-jacente très épaisse et relativement homogène. Celle-ci affleure sur les marges de la région (Normandie, Champagne) et n’est perceptible que dans la vallée de la Seine qui atteint une altitude suffisamment basse.

Débutant il y a 65 millions d’années, le tertiaire regroupe une succession d’étages de compositions très variées : alternance de sable, argile, calcaire ou marne. Cette multiplicité de faciès a conduit à distinguer l’originalité des paysages du Tertiaire parisien. Vers 25 millions d’années, au Miocène, la mer se retire définitivement. Ce retrait s’accompagne d’importants dépôts des « Sables de Lozère » témoignant du tracé d’un ancien fleuve s’écoulant depuis le Massif Central jusqu’à la Manche.

Parallèlement à ces cycles, des mouvements tectoniques produisent une série de légers plissements principalement orientés suivant la direction armoricaine imprimant les grandes lignes topographiques. Débutant il y a environ 2 millions d’années, le Quaternaire, correspondant à un refroidissement du climat, accusé par des cycles de glaciations, entraîne une intensification des phénomènes érosifs. Le relief se dégage suivant les lignes de moindre résistance. Le réseau hydrographique façonne les vallées en accumulant les alluvions tandis que d’importants dépôts éoliens sablo-limoneux se répartissent sur les plateaux.

La dernière glaciation s’achève il y a environ 10 000 ans, faisant place à un climat tempéré. La forêt conquiert progressivement l’ensemble du territoire pendant que la révolution néolithique est en marche.

Les grands ensembles géologiques et paysagers

publié le 13 novembre 2014 (modifié le 8 janvier 2015)

De l’histoire géologique du tertiaire parisien, résulte une alternance de terrains meubles, argiles ou sables et de couches dures principalement du calcaire. Ces dernières déterminent de grandes surfaces structurales emboîtées comme un jeu de carte, selon un léger pendage déclinant vers le sud. Moins stables, les terrains meubles ont tendance à affleurer sur des pentes plus ou moins douces.

La plateforme Stampienne

Plus des deux tiers de la partie sud des Yvelines sont occupés par l’assise stampienne, soit la plus récente. Le cœur de cette plateforme est constitué par la formation des sables de Fontainebleau dont l’épaisseur peut atteindre une soixantaine de mètres. Celle-ci est surmontée par une mince formation protectrice constituée de meulière de Montmorency provenant de l’altération des calcaires d’Etampes. S’étendant d’abord de manière continue depuis la Beauce jusqu’au massif de Rambouillet et à l’Hurepoix celle-ci finit par disparaître vers le nord, dévoilant les faciès d’érosions sinueux des pentes sableuses.

Des fragments de cette plateforme subsistent ponctuellement au gré des plissements d’orientation sud-est/nord-ouest. Elle engendre les fameuses « buttes témoins », d’échelles très variables, mais dont les plus importantes sont les buttes des Alluets-Marly, de Thoiry et du Vexin. Cette masse de sable détermine une vaste nappe perchée retenue par la formation des argiles vertes au niveau desquels s’écoulent de nombreuses sources. C’est pourquoi les noyaux des villages anciens, greffés sur ces sources, occupent des altitudes précises dans les flancs des pentes : par exemple 125 m tout autour du plateau des Alluets-Marly.

De cette entité géologique Stampienne découle en partie la très grande extension des « horizons forestiers », rendus d’autant plus visibles par la continuité des coteaux sableux. En partie ouest, la forêt de Rambouillet se développe sur les sables de Fontainebleau et les dépôts des sables éoliens. Partiellement recouvert par les limons éoliens, le plateau offre un paysage ouvert de grandes cultures notamment sur la Beauce et le plateau de Saclay.

Les plateformes bartonienne et lutétienne

Sous les assises stampiennes, à la faveur des vallées secondaires, apparaissent deux surfaces structurales successives. La première relativement fine, est constituée par le calcaire de Saint-Ouen (Bartonien) souvent encore surmonté de marnes ludiennes. Erodée, elle cède la place aux calcaires du lutétien, plus épais. Ces plateformes trouvent leur plus grande extension dans le Mantois, la plaine de Versailles et, dans une moindre mesure, à l’approche de la Vallée de la Seine ainsi que de dans la vallée de la Vesgre et au pied des buttes du Vexin.

Cette entité détermine un ensemble de plaines et plateaux intermédiaires généralement cultivés mais accueillant parfois un parcellaire relativement varié. A l’approche des coteaux surplombant la Vallée de la Mauldre et de la Seine s’observe le développement des vergers notamment sur les marnes ludiennes. Ils ont toutefois tendance à disparaître au profit de l’urbanisation. Sur forte pente, les coteaux peuvent héberger des pelouses calcaires ainsi que de belles continuités boisées sur la Seine, comme en amont à Bougival ou sur le Vexin à Triel, mais également sur la Vaucouleurs et la Mauldre.

Les terrasses alluviales de la Seine

La vallée de la Seine constitue une grande entité reposant sur des alluvions plus ou moins récentes. Les basses terrasses se prêtent au développement de l’urbanisation et à l’exploitation des sables et graviers. Elle conserve néanmoins des espaces de grande culture tandis que sur les terrains drainants, les moins fertiles, subsistent des boisements et parfois des reliquats de pelouses sèches. Les hautes terrasses aux sols ingrats hébergent de grandes forêts (Forêt de Saint-Germain-en-Laye, Bois du Chesnay) contribuant au charme des grands paysages Yvelinois.

Les soubassements crétacés

La craie du Crétacé apparaît au pied des coteaux de la vallée de la Seine, au niveau des Mureaux. D’abord imperceptible, son épaisseur va croissante vers l’ouest, préfigurant les paysages de la Haute Normandie. Cette entité devient particulièrement manifeste à partir des Carrières de Guerville découvrant une impressionnante falaise d’une quarantaine de mètres de haut.

S’accroissant vers l’aval, le Crétacé englobe le plateau et les vallons de la forêt de Rosny. Des pinacles blancs remarquables éclairent le long coteau boisé de la Roche-Guyon, qui compose l’horizon de la boucle de Moisson.

Les influences du substratum sur les usages du sol

publié le 13 novembre 2014 (modifié le 8 janvier 2015)

En deçà des grandes entités, la diversité des substrats géologiques module la composition paysagère en orientant l’hydrographie et l’usage du sol : à l’échelle locale, le paysage peut révéler l’influence du substratum.

Une organisation en mosaïque

Selon les situations, l’organisation du paysage peut se révéler homogène, ou au contraire faire l’objet d’un assemblage relativement complexe. Ce cas est fréquent pour le Tertiaire Parisien où les formations géologiques peuvent se succéder très rapidement.

Une organisation en transect

"En s'intéressant à la géologie, pour peu qu'on ait l'acuité de comprendre où et comment s'implantaient les villages des Yvelines, ça devient limpide. Du calcaire lutétien, une couche d'argile, et tout d'un coup on a l'eau, et le chapelet des villages qui est là. "

Alain FREYTET

En situation de pente, il peut être intéressant d’analyser l’organisation des éléments paysagers suivant la succession des formations, notamment lorsqu’on est en présence de nappes et de sources. L’usage traditionnel du sol et le type de milieux naturels se répètent souvent suivant des séquences type.

Les carrières

publié le 13 novembre 2014 (modifié le 8 janvier 2015)

Les sous-sols des Yvelines offrent une variété de matériaux qui ont pu être exploités pour divers usages. Les carrières y sont vectrices d’une transformation durable des paysages et des milieux.

Les gravières ou les sablières, grandes consommatrices d’espace, perforent régulièrement la plaine alluviale de la vallée de la Seine. Beaucoup d’exploitations ont fait place à des plans d’eau souvent utilisés comme bases de loisirs.

Les carrières de pierre à bâtir, creusées à même les falaises du lutétien, sont fréquentes dans la vallée de la Seine et de la Mauldre. Elles ont pu être converties pour divers usages troglodytiques (cave, stockage …).

La carrière de craie campanienne de Guerville accueille une zone natura 2000.

Les carrières de gypse ludien ont laissé de nombreux effondrements au sein même de la forêt de l’Hautil. Certaines d’entre elles forment des mares encaissées.

Même discrètes, les carrières souterraines génèrent des contraintes de sécurité qui conditionnent le devenir des espaces en surface et expliquent en partie l’aspect des paysages aujourd’hui en certains points du département, comme à Carrières-sur-Seine.

De nombreuses marnières sont présentes au sud du département. Quant à la meulière, elle a souvent été exploitée pour la construction, laissant de petites excavations en forêt, à la surface des plateaux.

Les matériaux de construction

publié le 13 novembre 2014 (modifié le 8 janvier 2015)

Les matériaux de construction, extraits du sous-sol et utilisés sur place, contribuent largement à la personnalité du patrimoine bâti des Yvelines. La répartition, les mélanges des matériaux, qui varient parfois d’un village à l’autre, expriment la géographie subtile de la roche sous-jacente.

La meulière est sans doute le matériau le plus spécifique : sa couleur jaune orangée agrémente les pavillons du XIXe siècle et du début du XXe siècle, dans des formes parfois savantes, sous forme d’écailles ou de rocailles.

Le gypse, transformé en plâtre, donne le bâti plus pâle et blanchâtre que l’on trouve dans le Vexin et dans la vallée de la Seine. Les calcaires durs, de couleur blanche, font la noblesse des bâtiments les plus importants, maisons bourgeoises, châteaux, églises.

En règle générale, les autres matériaux, issus des argiles, des sables, des grès et des calcaires grossiers sont traditionnellement enduits, donnant ces maisons coquettes et soignées que l’on voit dans le département. La mode discutable de la « pierre apparente » a pu fragiliser ce patrimoine, de même que les tristes enduits ciments aujourd’hui fort heureusement en voie de disparition grâce aux politiques de réhabilitations de façades.